Votre état d’esprit conditionne t’il celui de vos enfants ?

Par Guillaume Le Penher
sketchnote des 2 états d'esprit selon Carol Dweck

Quel est votre « état d’esprit » ou « mindset » ? Comment influence t’il votre culture familiale ? Votre état d’esprit conditionne t’il celui de vos enfants ?

Et vos enfants, avez-vous identifié le leur ? Comment se comportent-ils face à une erreur ou à un apprentissage difficile ?

Issues du vocabulaire du développement personnel, les expressions « état d’esprit » ou « mindset » fleurissent un peu partout tout en restant assez floues. Elles recouvrent pourtant un champs d’étude bien établi et qui révèle beaucoup de chose sur nous-même autant que sur nos enfants.

Et si notre état d’esprit conditionnait en partie notre équilibre familial ?… Nous allons voir dans cet article comment et pourquoi nous devrions tous comprendre les enjeux derrière notre état d’esprit au quotidien.

1/ C’est quoi l’état d’esprit ?

Avant d’aller plus loin, tentons de définir cette expression.

L’état d’esprit, c’est notre mentalité. C’est un état psychique, une représentation interne composée de valeurs et de convictions qui nous sont propres. On peut le considérer comme l’ensemble des croyances qui définit nos actions, nos réactions et nos interactions.

Vu comme ça, est-ce que vous comprenez déjà l’importance de l’état d’esprit chez nos enfants autant que chez nous ?

« Faire la même chose, mais avec 2 états d’esprit différents entraine des conséquences différentes »

Christophe André, « Les état d’âme : un apprentissage de la sérénité »

Sans en être totalement conscient, notre état d’esprit modèle notre vie et celle de nos proches par réaction et imitation. Il est donc crucial de l’explorer afin de savoir s’il nous conduit vraiment dans la direction que nous souhaitons. La réussite de notre couple, notre prospérité ou notre niveau de bonheur découlent directement de notre état d’esprit. Notre « mindset » est le prisme par lequel nous filtrons tous les évènements de la vie. Pourtant, une notion aussi essentielle est trop souvent laissée totalement au hasard.

D’ailleurs, vous-même qui lisez ces lignes, avez-vous déjà réfléchi à votre « mindset » ou à celui de votre enfant ?

  • Savez-vous quelles conséquences tel ou tel état d’esprit a concrètement sur votre vie ?
  • Et puis, peut-on en changer ?
  • Enfin, combien y a t’il d’états d’esprit différents selon les chercheurs ?

L’état d’esprit est un sujet qui me passionne car les enjeux qu’il recouvre sont énormes. Si le mindset définit une culture familiale, imaginez les conséquences d’un changement à l’échelle d’une génération ou de la société ? C’est un levier de développement sous-estimé. Au-delà de ce que dit Christophe André, un état d’esprit différent entraine également des actions différentes. Je me questionne en permanence sur les qualités à développer chez nos enfants pour qu’ils puissent affronter avec sérénité les défis énormes qui s’annoncent. Au cours de ces réflexions, j’en suis venu à élaborer un plan d’action articulé autour de 3 thèmes imbriqués : les Forces, l’État d’esprit et la Résilience. J’en ai déjà parlé rapidement dans un court article publié sur ce blog.

Voici mon équation : Forces + Mindset = Résilience

Pour approfondir vos connaissances et développer vos Forces, rendez-vous sur mon autre blog entièrement dédié à ce sujet : Des Forces pour la Vie ! Ce blog est lié à ma pratique de coach certifié par l’Institut Gallup pour le test CliftonStrengths (anciennement StrengthsFinder. Ne vous fiez pas à sa page d’accueil en anglais, le test est disponible en français). Le test en ligne CliftonStrengths permet de découvrir son profil unique de 34 thèmes. En apprenant à les connaitre et en s’exerçant, nous pouvons transformer nos plus grands talents naturels en véritables forces. Voici l’enjeu de ce blog : se concentrer sur ce que nous faisons naturellement bien au lieu de perdre notre vie à tenter d’améliorer nos lacunes…

2/ Combien d’états d’esprit ?

Selon la psychologue de l’Université californienne de Stanford Carol Dweck, il n’y en a que 2.

Comme ça, c’est plus simple.

Ah non en fait, c’est bien plus subtil !

Carol Dweck est la spécialiste mondiale du mindset depuis près de 50 ans ! Nous proposons d’ailleurs son livre majeur « Mindset, a new psychology of success » en synthèse graphique, résumé pdf et podcast sur la partie privée de ce site. En à peine une heure vous serez totalement familiarisée avec ce concept de mindset. Si vous n’êtes pas encore abonnée à notre plateforme, débloquez votre essai gratuit d’un mois en cliquant ici.

sketchnote des 2 états d'esprit selon Carol Dweck

J’ai déjà parlé à plusieurs reprises du concept passionnant d’état d’esprit et des travaux de Carol Dweck. Vous pouvez également lire cet article que j’ai publié sur le sujet il y a quelque temps.

Il y a donc selon cette chercheuse reconnue mondialement 2 états d’esprit :

  • L’état d’esprit Fixe (Fixed Mindset)
  • L’état d’esprit de croissance appelé aussi état d’esprit de développement (Growth Mindset)

OK. Mais en fait nous ne sommes pas tout l’un ou tout l’autre. Nous tirons d’un côté ou de l’autre en fonction de notre culture, de nos câblages cérébraux et des occasions…

Toutefois, notre personnalité globale fait appel à un de ces 2 schémas de pensée. Alors, comment les identifier ?

3/ Définitions et conséquences d’un état d’esprit fixe

Voici comment Carol Dweck définit l’état d’esprit fixe.

Avoir un état d’esprit fixe, c’est croire que nos capacités restent stables dans le temps et nous définissent. Nos qualités et nos défauts ne peuvent être modifiés qu’à la marge. Éviter les challenges permet de préserver une image positive car dénuée d’erreurs et d’échecs.

Les personnalités dominées par un état d’esprit fixe pensent généralement que :

  • L’intelligence est innée. C’est comme un don du ciel. Il y a les génies et les autres. Quoi que l’on fasse, on ne pourra pas y changer grand-chose. Votre fils n’a pas « la bosse des maths », il confond Pythagore avec l’artefact d’un jeu vidéo ? Laissez tomber l’idée d’un prix Nobel de mathématiques à 28 ans. Votre fille truffe un SMS de 2 lignes avec 46 fautes d’orthographe ? Tant pis, elle ne remplacera pas Marguerite Yourcenar ou Marie Darrieussecq (ouch ! Quel nom compliqué à écrire, j’ai bien failli passer pour un imbécile en faisant une faute d’orthographe… Fixed Mindset !). C’est comme ça, basta. On sait ou on ne sait pas.
  • Le succès consiste à prouver aux autres notre intelligence. « Regardez comme j’ai bien répondu à la maitresse », « Vous avez vu comme le patron a apprécié ma remarque ». Elles en déduisent qu’elles sont un peu « spéciales » et différentes de la masse. Elles cultivent une vision binaire de la réussite : moi face aux autres. D’ailleurs, ces personnes jalousent et dénigrent le succès des autres plus souvent qu’elles ne s’en inspire.
  • La réussite immédiate est le plus important. Si on ne réussit pas du premier coup, on expose nos failles au grand jour. C’est intolérable ! Un système de recherche de gratifications rapides se met en place et réduit la vision au court terme par opposition à l’effort sur la durée.
  • Face à l’échec, la cause est (forcément !) extérieure. « C’est pas de ma faute ! »… En psychologie, on appelle ça « l’external locus of control ». La théorie du « locus de contrôle » a été développée par Julian Rotter, psychologue américain. Elle définit notre sentiment de contrôle par rapport à nos performances ou notre sort. Les personnes au locus interne pensent que ce qui leur arrive dépend de leurs choix et de leurs actions. Elles estiment avoir un pouvoir élevé sur leur vie. Les personnes au locus externe s’en remettent généralement aux autres et à des facteurs sur lesquels elles n’ont pas de prise. Nous reviendrons sur la possibilité d’un parallèle entre « Fixed Mindset » et « External Locus ».
  • L’échec est stigmatisant. Il y a une valeur morale négative associée à l’échec. La résilience est d’autant plus difficile que l’échec est vécu comme honteux. Dans un cas extrême, le bannissement prôné par certaines sociétés ou religions (et qui vise principalement des femmes comme par exemple la virginité avant le mariage) est une forme de fixité poussée à son paroxysme. L’échec ou la faute morale rejaillit sur toute la famille qui réagit en excluant l’auteur(e) supposé(e) du forfait. Ce type de conduite anéanti quasiment toute forme possible de résilience.

Soyons honnêtes, nous avons tous des fixités. Carol Dweck elle-même le confesse volontiers ! Elle a même créé un personnage fictif avec son mari qui leur sert à défouler leurs fixités et leur « external locus ». En d’autres termes, on peut appeler cela un bouc émissaire. Robert Greene dans « Power : les 48 lois du pouvoir » nous rappelle que les innocents font les meilleurs coupables !

Alors, comment voit-on le monde doté d’un état d’esprit de développement ?

4/ Dans la tête d’une « Growth Mindset »

Voici, en opposition au tableau précédent, la mentalité de développement :

  • En premier lieu l’intelligence se développe. Nous n’avons pas tous le même capital de départ mais nous pouvons tous nous améliorer. Cela requiert du temps, de la persévérance et du travail. Il y a typiquement encore un lien ici avec la notion « d’internal locus ». Nous devenons ce que nous faisons, ce que nous apprenons. D’ailleurs, la folie « c’est de faire toujours la même chose et de s’attendre à un résultat différent »… Peu importe que cette citation soit d’Einstein, de Franklin ou de Rita Mae Brown, on comprend l’importance de l’éducation basée sur l’effort personnel.
  • Si la persévérance est importante, elle est inefficace lorsqu’on persévère dans une mauvaise voie… Une personne à dominante « Growth Mindset » adapte régulièrement ses stratégies en se nourrissant des feedbacks. Elle apprend de ses erreurs, cela fait partie intégrante du mécanisme d’apprentissage. On peut même voir ce phénomène d’excitation neuronale à l’imagerie cérébrale :Growth Mindset Archives - Des Forces Pour La Vie
  • La personne dotée d’un état d’esprit de développement s’inspire du succès des autres. Elle sait que même les « génies » ont dû travailler dur pour atteindre leurs objectifs. Elle refoule la vision facile du talent sans effort qui est souvent véhiculée.

5/ Le libre arbitre

Développer son état d’esprit, c’est atteindre un niveau de développement personnel et de réalisation de soi plus aboutis. Par le développement d’un niveau de réflexion supérieur, la personne dotée d’un « growth mindset » augmente son libre arbitre, refuse le déterminisme et le fatalisme. Nous revenons alors aux théories de Julian Rotter sur le locus de contrôle. Le libre arbitre est une forme de locus de contrôle interne.

Toutefois, les philosophes ont beaucoup débattu de la pertinence de ce concept de libre arbitre. Spinoza ou Nietzsche après lui ne croyaient pas au libre arbitre et étaient plutôt adeptes du déterminisme.

« Les hommes se croient libres pour la seule raison qu’ils sont conscients de leurs actions et ignorants des causes ».

Spinoza (cité par Jordanne Boudesseul dans sa thèse « Le libre arbitre de la philosophie aux sciences cognitives »)

Le déterminisme aurait plutôt tendance à nourrir une pensée « Fixe » basée sur un locus de contrôle externe. La question n’est pas de réduire ces éminents philosophes à un déterminisme figé mais de proposer une autre vision. La société actuelle fait grand usage du locus de contrôle externe. Les journaux télévisés, radio ou papier regorgent d’informations sur lesquelles nous n’avons aucune prise. C’est d’autant plus anxiogène que nous sommes impuissants. Le fatalisme monte en flèche alors que nous pouvons encore utiliser notre libre arbitre pour une action salvatrice : éteindre le poste ou reposer le journal !

6/ Le fatalisme : un poison familial ?

Le fatalisme nie le libre arbitre et le ridiculise. A quoi sert de se battre contre son destin après tout ? Même une volonté d’airain ne fait pas le poids face au déterminisme divin ou naturel…
Un tel état d’esprit conditionne négativement la culture familiale. Les efforts personnels, l’éducation, la persévérance sont du coup autant de notions vaines. On s’en remet à la Providence. Nous sommes là dans une caricature du fatalisme bien sûr.
Mettre ses enfants à l’école « pour qu’ils fassent des études et aient un bon métier plus tard » ne fonctionne plus. Est-ce pour autant une fatalité ? Devons-nous mettre notre énergie à blâmer cette école de quartier mal réputée, ce ministre qui coupe les crédits ou encore cette société si inégalitaire ? De mon côté, je ne le fais plus car j’en ai constaté l’inefficacité…
Et si, en tant que parents, nous passons notre temps à nous battre contre des moulins, la fatalité nous épuise. Quel modèle donnons-nous à nos enfants ? Aucun parent ne souhaite passer pour un impuissant aux yeux de ses enfants. Ce type d’attitude peut nourrir la rancœur et la jalousie chez les enfants.
La vision que l’on a de nous-même affecte profondément notre manière de vivre…
Carol S. Dweck
Contrairement à ce que nous font voir les médias, nous avons bien plus de contrôle sur nos vies qu’un serf du Moyen-Âge. Chaque jour, nous pouvons exercer notre libre arbitre en de nombreuses occasions. Et plus nous l’exerçons, plus notre sentiment de contrôle s’affirme. On passe doucement de la « focalisation sur les problèmes » (impuissance) à la « focalisation sur les solutions » (contrôle).
Ce changement de paradigme apporte de la confiance en soi contrairement au fatalisme qui nous rend craintif et résigné.
Maintenant, on peut se demander si des parents avec un état d’esprit de développement engendrent des enfants « growth mindset » ?…

7/ Les limites possibles d’un état d’esprit de développement…

On parle beaucoup des conséquences négatives d’un état d’esprit fixe. A l’opposé, je pense que l’état d’esprit de développement a aussi ses limites…
Même les « meilleurs parents » font des erreurs… C’est cruel mais véridique.
Par exemple, nous !
Nous faisons évidemment parti des « meilleurs parents au monde » ! Depuis que nous avons découvert ce concept d’état d’esprit, nous en parlons très fréquemment avec nos enfants de 7 et 12 ans. Ils connaissent autant que nous les différences entre les 2 mindsets décrits par Carol Dweck. Et pourtant la situation n’est pas si rose…
Premièrement, nous ne sommes que des humains et pas un univers en perpétuelle expansion ! Le développement demande des efforts constants et une volonté puissante (déterminisme ?). Là, Nietzsche serait satisfait de me voir revenir sous la coupole des Grandes Lois régissant le vivant. Qu’elles soient biologiques, humaines ou célestes ces lois nous rappellent à notre hérédité ou notre génétique. Nous succombons à des instincts puissants tel que la procréation. L’état d’esprit de développement peut alors se heurter à nos propres limites naturelles.
A force d’encenser le « growth mindset » au sein de la famille, on peut aussi développer un culte de la recherche de performance. Une performance qui diffère du culte du résultat (différence entre faire toujours mieux ou être le meilleur). Les effets à long terme pourraient se traduire par du découragement ou de l’épuisement. L’exigence personnelle élevée est un facteur de burn-out. Cette exigence peut également se révéler être un frein au développement d’un enfant. Ainsi notre fils de 7 ans éprouve des difficultés dans ses apprentissages car son niveau d’exigence n’est pas en adéquation avec ses résultats. Cela déclenche une frustration énorme qui se mue en fixité. La dictature de la perfection est un énorme facteur d’insatisfaction chronique.
Aller trop loin dans une culture de développement s’apparenterait donc à une forme de fixité ! C’est un comble.

8/ Encourager l’état d’esprit de développement chez les enfants

Si les comportements parentaux ont leur importance dans l’acquisition d’un état d’esprit de développement, ils ne suffisent pas. Carol Dweck a démontré que les parents les mieux intentionnés à l’égard de leur enfants pouvaient sans s’en rendre compte encourager une forme de fixité.
Vous savez, cette pratique si répandue et naturelle qui consiste à commencer une phrase par « Tu es… » et à la terminer par un constat sans appel. Ou bien la généralisation. « A chaque fois que tu fais… ».
Ces modes de communication engendre des esprits statiques. « Puisque JE SUIS comme ça, il est peu probable que ça change… ».
En modifiant notre manière de parler et en supprimant ce type de réflexions qui n’ont pas d’autres but que de soulager notre frustration, nous avons un impact puissant sur la construction cérébrale de nos enfants.
Couverture du livre Mindset de Carol Dweck
De même dans leurs apprentissages, nous avons trop tendance à nous focaliser sur les lacunes et les résultats. C’est un mécanisme puissant de démotivation pour les enfants. Leur cerveau en construction ne voit déjà pas toujours l’intérêt ou la finalité de tel apprentissage alors si en plus on lui rajoute une pression psychique, c’est cuit ! En mode « growth mindset », on valorise le processus et l’amélioration de la méthode ainsi que le goût de l’effort. On se focalise sur la progression. La note est un indicateur parmi d’autres.
Encourager l’état d’esprit de développement chez les enfants, c’est leur donner assez de confiance pour qu’ils cherchent à surmonter leurs difficultés présentes. Ils multiplient alors sans hésiter les expériences… et les erreurs ! Puisque l’erreur est alors une occasion unique d’apprendre et d’adapter sa stratégie. Et ce n’est pas juste un discours comme au collège de ma fille où les profs sont encore entre 2 modèles. Ils encouragent verbalement l’état d’esprit de développement chez leurs élèves tout en exigeant des cahiers où le Tippex a maquillé les horribles fautes… Pour quel résultat ? Au lieu d’exprimer clairement un cheminement mental d’un problème de math ou l’intérêt d’une relecture pour corriger l’orthographe, on tente maladroitement de faire croire au génie divin de l’élève. Avec des tâches blanches qui se voient comme le nez au milieu de la figure !
C’est en valorisant le potentiel d’apprentissage de l’erreur que nous aidons les élèves à affronter les défis de l’apprentissage sans peurs, sans honte et en toute confiance. Vous pouvez allez encore plus loin sur ce sujet en lisant cet article ou en suivant le chemin d’une famille (la notre !) plongée dans une « Growth année »… Un autre concept peut aider les enfants dans leurs apprentissages : la zone de développement proximal théorisée par le psychologue russe Lev Vygotski.

9/ Lev Vygotski et la Zone Proximale de Développement

Cette théorie plus ancienne que celle des 2 états d’esprit se rejoignent sur certains points. Pour Vygotski, il existe 3 zones distinctes :

  • La zone d’autonomie (notre zone de confort en quelque sorte). C’est la zone ou le challenge est inexistant car l’exercice est trop facile. Chez Carol Dweck, elle évoque la zone préférée de l’état d’esprit fixe car il peut sans crainte répondre correctement sans se mettre en difficulté.
  • La zone proximale de développement. Le niveau de difficulté est à la porté de l’élève s’il mobilise ses connaissances et sa réflexion ou qu’il bénéficie d’un guidage partiel. Il mobilise ses ressources car il sent qu’il peut réussir. Cette zone est le lieu du développement, celle où nous devons guider l’apprenant. L’état d’esprit de développement y est à son aise.
  • La zone de rupture. Le challenge est trop ambitieux. Le niveau de difficulté empêche la mobilisation des efforts.

Le psychologue russe nous rappelle que l’apprentissage implique « un véritable et complexe acte de la pensée ». Il s’oppose ainsi au behaviorisme (stimulus-réponse) en vogue à son époque.

Admettons, écrit-il, que nous ayons déterminé chez deux enfants un âge mental équivalant à huit ans. Avec l’aide d’un adulte, l’un résout des problèmes correspondant à l’âge de 12 ans, tandis que l’autre ne peut résoudre que des problèmes correspondant à l’âge de 9 ans. C’est précisément cette différence qui définit la zone prochaine de développement. Elle est de 4 pour le premier enfant et de 1 pour le second. Ainsi, la zone prochaine de développement d’un élève est pour Vygotski «l’élément le plus déterminant pour l’apprentissage et le développement». Car «ce que l’enfant sait faire aujourd’hui en collaboration, il saura le faire tout seul demain».

Extrait de l’article de scienceshumaines.com

Nous devons donc nous assurer en permanence que nos enfants évoluent en zone proximale de développement. Ils peuvent aussi compter sur leurs talents naturels…

10/ Les talents naturels et les Forces

« Hey mais attends Guillaume ! C’est pas contradictoire avec tout ce que tu viens de dire ? L’état d’esprit de développement, l’effort et le libre arbitre… Si les génies n’existent pas, qu’en est-il du talent ? »
OK, ça nécessite une petite clarification !
Vous le savez, la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme doit être lue jusqu’au bout :
Article 1 : « Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. Ils sont doués de raison et de conscience et doivent agir les uns envers les autres dans un esprit de fraternité. »
Donc, en excluant le droit et la dignité, nous naissons tous dotés de capacités différentes. Certains diraient « uniques » d’autres « inégaux ». Soit. Ce potentiel de départ ne présume pas vraiment des réussites futures. Ensuite, au cours de notre croissance, nous constituons des « autoroutes cérébrales » en fonction de nos expériences. Ces chemins neuronaux prioritaires influencent fortement la manière dont nous pensons, nous agissons et nous nous comportons.
Et comme vous êtes arrivés jusqu’ici dans cet article, vous savez que le cerveau est un comme un muscle. Plus on le fait travailler, plus il gagne en puissance. L’intelligence n’étant pas figée (growth mindset) on peut la développer toute la vie. On peut aussi modifier certains chemins neuronaux avec des efforts qui vont croissant au fur et à mesure que nous vieillissons. Toutefois, nous avons tous une manière qui nous est propre d’envisager les choses et d’y réagir. Notre architecture globale se stabilise avec la fin de la croissance du cerveau vers 20-25 ans.
Nos manières personnelles de ressentir, d’agir et de se comporter sont parfois appelés ‘talents ». Sur le plan de la psychologie, ce terme est neutre. Nous pouvons vivre chacun de nos talents positivement, négativement ou alterner. En les découvrant, les nommant et en comprenant leur expression dans nos vies, on commence un nouveau cheminement. Avec des connaissances et en investissant du temps nous pouvons développer nos talents prédominants en Forces (par exemple l’analyse, la communication, le goût d’apprendre, le focus ou la responsabilité. Il en existe 34 chez Gallup et 24 à l‘Institut VIA Character) . Ces Forces nous aident à atteindre des niveaux d’épanouissement personnel supérieurs. Dans notre vie sociale, professionnelle ou familiale nos forces nous aident en permanence lorsqu’on peut les mobiliser sciemment.

11/ Le génie de la lampe

Vous vous souvenez d’Aladin et de sa lampe ? On la frotte, le génie sort et nous exhausse un vœu dans l’instant… Y croyez-vous réellement ?
Pourquoi croyons-nous alors encore aux « petits génies » ?…
Ce concept médiatique de « génie » ne survit que par commodité. Quoi de plus facile que de dire d’untel qu’il est un pur génie. On met de côté le travail acharné et on rêve à un don divin. Carol Dweck a étudié des sportifs qui avaient dès leurs débuts un niveau très supérieur à la moyenne. Leur état d’esprit a énormément influencé le niveau et la durée de leur carrière. Un sportif « fixe » trouve toujours des excuses, il n’est pas réceptif au feedback et se ferme aux conseils avisés. Il en résulte une moindre utilisation du « combo magique » des Forces et de l’état d’esprit. Est-ce véritablement exercer son libre arbitre que de rejeter en permanence la faute sur des facteurs extérieurs ? On peut en douter. Et si tout est de la faute des autres comment se reconstruire après une défaite cuisante ? Quelle leçon tirer d’un échec. La résilience est donc bien plus faible chez une personne qui ne connait pas ses Forces et dotée d’un état d’esprit fixe.
A ce stade, il faut aussi distinguer les talents naturels et les Forces avec les compétences, les savoir-faire ou les techniques. Si les premiers sont plutôt innés, les seconds s’acquiert grâce à un travail productif et organisé. Chacun peut obtenir des résultats similaires grâce à des Forces différentes. Prenons l’exemple de l’influence. Vous pouvez gagner en influence en faisant preuve de qualités de communication ou relationnelle (Forces). Vous pouvez également faire croitre votre influence par l’exemple, votre travail acharné par exemple ou votre impartialité. Il en va de même pour un travail scolaire. un étudiant peut mobiliser ses capacités d’analyse pour résoudre un problème de maths ou parvenir à un résultat identique en activant sa force de collection de données et d’infos (Input).

12/ Pour finir… temporairement !

Nous avons donc survolé dans cet article plusieurs concepts qui s’interpénètrent et se renforcent. Je viens de vous présenter non pas un mais 4 notions qui décuplent la puissance de tout être humain :

  • L’état d’esprit de développement
  • Le libre arbitre
  • La Zone Proximale de Développement
  • Les Forces

Ce sont 4 piliers sur lesquels bâtir une éducation et un épanouissement complet. En plus, nous avons une chance immense : rien n’est définitif ou figé. Les recherches récentes en neurosciences nous démontrent l’étonnante plasticité du cerveau tout au long de la vie. Bien sûr il est plus facile de commencer tôt. Mais chacun de nous peut à tout instant prendre conscience des fixités qui l’entravent et choisir d’appliquer ses Forces à les dépasser, étape par étape afin de rester mobilisé. En faisant cela, nous donnons un exemple différent à nos enfants. Finalement je pense que l’éducation commence par les adultes avant de concerner les enfants. Nous n’apprenons pas à être parent alors que c’est certainement le rôle majeur qui nous incombe. N’est-ce pas fou quand on y pense ? Bien souvent, nous demandons beaucoup à nos enfants, plus ou moins consciemment. Au fond, sommes-nous aussi exigeants envers nous-même ?

Je crois sincèrement qu’un équilibre familial durable peut se créer en intégrant tous (parents et enfants) ces 4 piliers. Maintenant, imaginons la société administrée par une génération complète éduquée selon ces principes ?

Je reviendrai régulièrement sur ces 4 piliers qui guident ma réflexion et portent tant d’espoir de générosité, d’entraide, d’épanouissement, de coopération et d’harmonie…

Guillaume

Un père en constante progression…

PS : Le livre « Mindset : A new Psychology of success » de Carol S. Dweck est disponible en français en résumé audio, pdf et synthèse graphique dans votre espace privé de cette plateforme.  Démarrez votre essai gratuit dès aujourd’hui en suivant ce lien.